L'homme de Neandertal, ce rouquin au teint pâle

Publié le par Didier

Le Figaro du 26 10 2007 Stéphane Foucart

Quelle tête pouvait-elle avoir, cette autre humanité ? Face à Homo neanderthalensis, Homo sapiens reconnaissait-il un presque semblable ou un irrémédiable étranger ? Cette question - une des plus intrigantes posées par la paléo-anthropologie - trouve, vendredi 26 octobre dans la revue Science, un premier élément de réponse.

Selon des analyses d'ADN ancien menées par des chercheurs espagnols, italiens et français, l'homme de Neandertal pouvait être roux et pâle, d'une pigmentation assez semblable à celle rencontrée aujourd'hui dans les populations du nord de l'Europe.

Les néandertaliens ne sont pas les ancêtres des hommes actuels. Il y a environ 400 000 ans, ils colonisent, depuis l'Afrique, l'Europe et l'Asie centrale alors sous un climat très rigoureux. Ils disparaissent sans descendance il y a environ 25 000 ans. Pourquoi ? Cela est débattu, mais l'arrivée il y a 40 000 ans d'un nouveau venu africain, Homo sapiens, n'y est sans doute pas étrangère. 

De deux échantillons osseux de néandertaliens vieux de 50 000 et 43 000 ans, retrouvés en Italie et en Espagne, les chercheurs sont parvenus à extraire du matériel génétique ancien. Ils y ont découvert la séquence de MC1R, le gène qui code (dans les populations actuelles) pour les cheveux roux et le teint laiteux. "Ce n'est pas surprenant, dit la paléontologue Silvana Condemi (CNRS), coauteur de ces travaux. La peau pâle est un trait d'adaptation aux latitudes où l'ensoleillement est faible : elle favorise la synthèse de vitamine D, qui se produit lors de l'exposition au soleil."

La découverte de ce gène de dépigmentation chez les néandertaliens soulève la question - très débattue - d'une hybridation entre ces derniers et Homo sapiens. Les roux ont-ils hérité de ce trait à la suite d'"unions" entre ces deux humanités ?

"A priori non, répond Mme Condemi. Le gène identifié sur les deux fossiles comporte une mutation qu'on ne retrouve pas chez les humains modernes, ce qui plaide en faveur de deux évolutions séparées, sans mélanges." Confrontées à des climats semblables, les deux espèces ont donc évolué de la même façon.

Certains clichés, qui ont la vie dure, vont aussi devoir être revus. Homo sapiens "est souvent représenté dans les livres pour enfants comme un grand blond conquérant, alors que l'homme de Neandertal, parce qu'il est censé être archaïque, est représenté petit, râblé et hirsute avec une pigmentation plus sombre, s'amuse le paléoanthropologue Pascal Picq (Collège de France). Un certain racisme affleure dans cette vision qui, on le voit avec ces travaux, n'a absolument aucun fondement."

Publié dans ARCHEOLOGIE

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